La Charte des droits et libertés de la personne
La Charte des droits et libertés de la personne, aussi surnommée la « Charte québécoise », est une loi dite « quasi constitutionnelle » adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale du Québec le 27 juin 1975. Elle est entrée en vigueur le 28 juin 1976.
La Charte reconnaît que tous les individus qui se trouvent au Québec sont égaux en valeur et en dignité. Ayant pour objectif d'assurer les droits humains et d'harmoniser les rapports des citoyens entre eux et avec leurs institutions, la Charte s’applique tant aux activités de l’État (législatives et exécutives) qu’aux rapports de droit privé (entre citoyens). La Charte institue aussi la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, qui est chargée de sa promotion et de son application, ainsi que le Tribunal des droits de la personne.
La Charte est un texte fondamental du système juridique québécois, qui a préséance sur les lois et règlements provinciaux. Ce faisant, tout texte législatif et réglementaire québécois doit s'y conformer, sous peine de déclaration de non-validité. Seule la Constitution du Canada (ce qui inclut la Charte canadienne des droits et libertés) a préséance sur la Charte québécoise.
La Charte québécoise a été décrite comme un « document unique dans l'histoire législative canadienne ». Elle a été rédigée sur la base des principes d'indivisibilité, d'interdépendance et d'indissociabilité des droits de la personne. La Charte s'inspire notamment de la Déclaration universelle des droits de l'homme, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
Le droit à l’égalité de tous les individus est protégé par l'article 10. En effet, cet article interdit la discrimination en garantissant à toute personne le droit d’être traitée en pleine égalité et d’exercer ses droits et libertés sans « distinction, exclusion ou préférence » fondée sur une caractéristique personnelle qui constitue un motif de discrimination interdit. La Charte interdit la discrimination fondée sur une liste exhaustive de motifs : la race, la couleur, le sexe, l'identité ou l'expression de genre, la grossesse, l'orientation sexuelle, l'état civil, l'âge (sauf dans la mesure prévue par la loi), la religion, les convictions politiques, la langue, l'origine ethnique ou nationale, la condition sociale, le handicap ou l'utilisation d'un moyen pour pallier ce handicap.
« Considérant que tout être humain possède des droits et libertés intrinsèques, destinés à assurer sa protection et son épanouissement; Considérant que tous les êtres humains sont égaux en valeur et en dignité et ont droit à une égale protection de la loi; Considérant qu’il y a lieu d’affirmer solennellement dans une Charte les libertés et droits fondamentaux de la personne afin que ceux-ci soient garantis par la volonté collective et mieux protégés contre toute violation : Tout être humain a droit à la vie, ainsi qu’à la sûreté, à l’intégrité et à la liberté de sa personne. La demeure est inviolable. Toute personne a droit, en pleine égalité, à une audition publique et impartiale de sa cause par un tribunal indépendant et qui ne soit pas préjugé, qu’il s’agisse de la détermination de ses droits et obligations ou du bien-fondé de toute accusation portée contre elle. Nul ne peut être privé de sa liberté ou de ses droits, sauf pour les motifs prévus par la loi et suivant la procédure prescrite. »
Toutes les personnes, les groupes et organismes, les entreprises privées, les services publics et les services privés, ainsi que le gouvernement du Québec (ses institutions et les administrations gouvernementales municipales et scolaires, à tous les échelons de la hiérarchie) doivent respecter la Charte. Seules les institutions de compétence fédérale échappent à l’application de la Charte, soit: la fonction publique fédérale, les banques, les entreprises de télécommunications (Radio-Canada, TVA, etc.), les services de transport aérien, ferroviaire ou maritime (Air Canada, Via Rail, etc.). C'est la Loi canadienne sur les droits de la personne qui s'applique à ces institutions et c'est la Commission canadienne des droits de la personne qui peut intervenir.
Application de la charte
La Charte est une loi fondamentale qui a préséance sur toutes les autres lois québécoises. En effet, l'article 52 de la Charte prévoit que « aucune disposition législative, même postérieure à la Charte, ne peut déroger aux articles 1 à 38 (…) à moins que cette loi n'énonce expressément que cette disposition s'applique malgré la Charte ». Seuls les droits fondamentaux, politiques et judiciaires ont donc prévalence sur les autres lois. Ainsi, même s’ils sont inscrits dans la Charte, d’autres droits ne jouissent pas du même statut. C’est notamment le cas de l’ensemble des droits économiques et sociaux (articles 39 à 48), une situation décriée par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse depuis de nombreuses années.
La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse est l'organisme responsable de l'application de la Charte et peut intervenir dans les cas de discrimination et de harcèlement fondés sur des motifs interdits et dans les cas d’exploitation des personnes âgées ou handicapées. La Commission peut faire enquête à la suite de la réception d'une plainte et défendre des causes devant le Tribunal des droits de la personne, par exemple. Le Tribunal des droits de la personne, un tribunal spécialisé en matière de discrimination, de harcèlement, d’exploitation et de programmes d’accès à l’égalité, assure quant à lui le respect des différents droits protégés par la Charte depuis le 10 décembre 1990.